Le vandalisme capitaliste : quelle solution ? (Edito 77)

F in mars, le nombre d’inscrits à Pôle Emploi n’ayant pas ou n’ayant que très peu travaillé dans le mois s’élevait à 5,59 millions ! La production et l’activité commerciale stagnent dans son ensemble avec une destruction correspondante de l’emploi dans les différentes branches de l’économie. Les chiffres définitifs du troisième trimestre de 2014 sont désormais disponibles. Ils montrent que sur les 13 semaines en question, 55200 emplois ont disparu dans le secteur marchand et 11300 emplois dans le secteur industriel. Dans la construction, 15200 emplois ont été détruits en trois mois, portant le chiffre annuel à 36800. Depuis l’élection de François Hollande, le nombre de chômeurs en France a augmenté de près de 600 000.

Au vandalisme de la classe capitaliste qui détruit l’économie pour sauvegarder ses profits s’ajoute le vandalisme du gouvernement. L’endettement de l’Etat se situe à près de 2000 milliards d’euros. Les seuls intérêts à verser sur cette somme sont bien plus élevés que la totalité des recettes de l’impôt sur les revenus. Pour payer les banques, le gouvernement tranche dans les finances des services publics tels que la santé et l’éducation nationale. Dans les hôpitaux par exemple, 20000 emplois ont été supprimés en 2013, 15000 de plus en 2014, et encore 22000 suppressions d’emplois dans ce secteur sont prévus d’ici 2017.

Face à ce bilan capitaliste désastreux, les manifestations du 9 avril dernier ont permis d’exprimer la colère et montrer la capacité de mobilisation des militants du mouvement ouvrier. Les revendications avancées à de telles occasions – concernant les salaires, l’emploi, la défense du secteur public et des droits des travailleurs sont totalement justifiées. Mais la grande faiblesse du mouvement est l’absence d’un programme général – d’un projet de société – susceptible de capter l’attention d’une masse de travailleurs beaucoup plus large. Même une manifestation avec une participation aussi importante que celle du 9 avril n’est jamais qu’une simple protestation aux yeux du grand public, si elle n’est pas liée à un programme général.

On est contre le capitalisme, certes, mais quelle est l’alternative ? Si le PCF, la CGT et le mouvement ouvrier en général ne parviennent pas à répondre à cette question, le malaise social profitera – et profite déjà – aux forces politiques réactionnaires comme le Front National. Le nationalisme et le racisme se renforcent dans la société française. C’est une expression de la crise sociale, certes. Mais c’est aussi une conséquence de l’absence d’un programme politique présentant une alternative cohérente au capitalisme dans notre camp.

Les banques appartiennent aux capitalistes. Elles saignent l’économie et drainent les ressources de l’Etat. On dénonce la spéculation financière. C’est bien. Mais qu’est-ce qu’on propose ? Un mouvement syndical et politique qui ne lutte pas pour enlever le contrôle des banques aux capitalistes – par la nationalisation et le contrôle démocratique du système bancaire – se cantonne à un rôle de protestation et ne présente pas une solution au problème. Il en va de même pour la défense de l’emploi ou la destruction de l’industrie. Toutes les grandes entreprises devraient être nationalisées et les ressources qu’elles génèrent devraient servir au redressement de l’économie, plutôt qu’à augmenter la fortune et le pouvoir des capitalistes. Ce sont là les idées fondamentales du socialisme – ou du communisme, c’est la même chose, en substance – qui ont été mises de côté au fil du temps, mais qui sont aujourd’hui d’une actualité brulante.

On entend souvent que cette remise en cause directe de la propriété capitaliste correspondrait à une « prochaine étape », et qu’il convient de se limiter, dans le programme du PCF, à des préoccupations plus « immédiates ». Mais cette approche est erronée. Il est indispensable de proposer une alternative au capitalisme et de s’efforcer de convaincre les travailleurs de sa validité. Regardez ce qui se passe en Grèce. L’élection de Syriza a soulevé un immense espoir, en Grèce et dans toute l’Europe. Enfin un gouvernement qui s’oppose à la politique rapace de l’Union Européenne, à l’austérité et à l’injustice sociale ! Mais précisément parce que ce gouvernement s’est trouvé « immédiatement » confronté à l’hostilité des capitalistes en Grèce et à l’échelle européenne, et parce qu’il se refuse à prendre des mesures décisives contre les intérêts capitalistes, il a dû abandonner sa politique de réformes sociales et a même intégré dans son propre programme bien des éléments de celui de ses ennemis, comme par exemple la poursuite des privatisations.

Ce sera la même histoire partout. Si nous n’avons pas le courage de proclamer clairement et hardiment la nécessité d’exproprier les capitalistes, et de les priver ainsi du pouvoir économique qui leur permet de saborder le programme d’un gouvernement de gauche, nous serons réduits à l’impuissance face aux capitalistes. La lutte des classes est aussi une lutte idéologique. Le combat contre le capitalisme est indissociable de la lutte pour nous émanciper des limitations du « réformisme » – qui prétend résoudre les problèmes engendrés par le capitalisme sans toucher aux fondements de celui-ci – et pour l’adoption d’une politique communiste.

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