Loi Macron : encore une offensive contre les travailleurs !

L e ministre de l’Economie Emmanuel Macron présentera courant janvier au parlement un projet de loi qui représente une nouvelle concession faite au patronat.

Le Code du travail, cet outil acquis au cours des luttes de la classe ouvrière pour limiter l’arbitraire de l’exploitation capitaliste, est de nouveau mis à mal. Cela avait commencé avec la loi de sécurisation de l’emploi en 2013 qui offrait, parmi les différents points, notamment des facilités de licenciement en demandant aux personnels des DIRRECTE (les Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) de faciliter la négociation d’un accord qui puisse permettre, dans chaque cas, qu’un plan de licenciement ne puisse échouer.

Le gouvernement remet le couvert avec le projet de loi de son ministre de l’économie. Il était illusoire d’attendre d’un des éléments les plus droitiers du PS un projet de loi qui aille dans le sens de l’intérêt des travailleurs. C’est dans l’ordre des choses : le gouvernement suit son cap pro-capitaliste, rampant devant le MEDEF. « I’m pro-business, j’aime l’entreprise » nous avait annoncé Manuel Vals  en partageant un moment de convivialité avec la City de Londres et Pierre Gattaz, le patron des patrons. Il faut comprendre dans ces propos : « Vous, grands entrepreneurs,  avez le pouvoir économique, dites-nous ce que vous voulez et nous traduirons cela en lois ». Telles sont les véritables intentions de ce gouvernement aux ordres de la classe capitaliste. De fait, cette loi, dans ses nombreux articles (plus d’une centaine en tout), fait la part belle aux idées dominantes ultralibérales: souplesse des licenciements, précarisation de l’emploi, désengagement de l’État, recul des droits des salariés…

Nous sommes en présence d’un projet de loi regroupant un melting-pot d’idées plus fumeuses les unes que les autres, émanant de divers ministères et de groupes de réflexion, surtout de droite, et se basant sur le rapport de la commission Attali de 2008, à laquelle Macron siégeait comme secrétaire général. Au sein même des rangs des parlementaires PS, ce projet de loi ne fait pas l’unanimité.

Beaucoup espèrent amender la loi qui représente pour eux un sérieux écart aux « valeurs de gauche », qui se trouvent troquées pour les valeurs du capital. Les débats risquent d’être houleux pour faire adopter cette loi dont certains pans ne seront pas mis à la discussion et passeront probablement par ordonnance, c’est-à-dire par le passage en force de certains articles qui pourraient être rejetés par les propres rangs de la majorité. Il permet au gouvernement d’éviter toute contestation sur les questions les plus fondamentales et d’imposer sa brutalité, la brutalité qu’impose le capital.

La France est sous la surveillance de la Commission Européenne qui doit rendre une décision pour le mois de mars à son propos. Il faut entendre par « surveillance » que Bruxelles demande à la France d’avancer rapidement  ses contre-réformes afin de se conformer aux règles de l’Union Européenne pour pallier aux déséquilibres macroéconomiques. Il faut se mettre en règle sur les points encore considérés comme verrouillés du point de vue de la libéralisation de l’économie et avancer vers l’uniformisation du grand marché unique. Ici l’UE n’œuvre que dans l’intérêt de la classe capitaliste, qu’elle soit française ou étrangère, qui elle-même fait pression sur ses gouvernements nationaux pour avancer dans ce sens. Cette loi est donc une des étapes pour casser la protection des salariés et « séduire » Bruxelles. Elle regroupe un certain nombre de points très variés dont les principaux sont présentés ci-dessous.

Le travail du dimanche

C’est une des mesures phare de cette loi rétrograde et ce n’est pas pour rien que le gouvernement use de séminaires ministériels pour faire accepter cette idée. Il y a eu auparavant toute une série de sondages permettant à l’idéologie dominante de faire accepter cette idée. Un sondage BVA publié début octobre montrait que 63% des français étaient favorables au travail dominical en échange d’une contrepartie salariale. Cela veut juste dire qu’en période de crise, alors que le pouvoir d’achat diminue, que la vie devient de plus en plus difficile, les français accepteraient de travailler le dimanche. Il s’agit là d’une contrainte et non d’un souhait.

Cette mesure touche les salariés du commerce par l’ouverture possible des magasins 12 dimanches contre 5 actuellement par an. Concernant les zones touristiques où les magasins peuvent être ouverts tous les dimanches puisqu’elles représentent un « fort potentiel économique », elles seront élargies inéluctablement, touchant un grand nombre de salariés.

Par ailleurs, les grandes enseignes (IKEA, Virgin…) ont bénéficié de lois d’exception leur permettant d’ouvrir le dimanche, ce qui a permis à d’autres de s’engouffrer dans la brèche en faisant valoir le droit à la concurrence. De même pour les centres commerciaux caractérisés comme PUCE (Périmètre d’Usage Commercial Exceptionnel) dans des zones supérieures à un million d’habitants, depuis la loi Mallié sous Sarkozy en 2009 qui avait légalisé des pratiques patronales illégales par des ouvertures le dimanche, la nouvelle loi permettra à tout centre commercial de bénéficier des mêmes dispositions.

Pourtant qu’est ce qui justifie l’ouverture du dimanche? Les magasins gonfleront-ils leurs chiffres d’affaires avec 1 jour de plus ? Les travailleurs auront-ils plus d’argent à dépenser dans ces magasins? Bien sûr que non. Au mieux ils dépenseront en 7 jours ce qu’ils dépensaient en 6 jours. De même que les touristes – en visite le dimanche – ne représentent pas un chiffre d’affaires qui justifie cette mesure. L’enjeu n’est pas ici, il s’agit dans un contexte de crise, dans une économie en contraction, avec un pouvoir d’achat en diminution, d’être le premier sur le marché, et l’ouverture le dimanche permet aux entreprises commerciales de s’accaparer des parts de marché et dans le même temps d’en finir avec le petit commerce, obstacle aux grandes enseignes dont les effectifs et les finances ne permettent pas d’assurer une continuité d’ouverture.

Droit du travail et Justice Prud’homale

Officiellement, les 35 heures ne sont pas remises en cause – nous pourrions dire « pas encore ». Néanmoins, la loi permettra de négocier des accords qui dérogeront au temps de travail légal sans pour autant que cela  soit issu de difficultés économiques. Autant dire qu’à l’heure où les 35 heures sont fortement contestées, considérées « nuisibles » à la compétitivité, une pluie d’accords antisociaux va s’abattre sur les salariés et leurs organisations syndicales.

Sur le plan des licenciements, la loi prévoit de laisser à l’entreprise le choix des critères, et permettre, quand le licenciement concerne un faible effectif, qu’il n’y ait plus de vérification de la DIRRECTE sur la consultation des représentants du personnel. On dépouille délicatement et habilement le droit d’intervention des salariés dans l’entreprise, leur droit de contester et les moyens d’y parvenir. Dans ce cadre, les prud’hommes seront sévèrement affectés par la loi ; justifiant d’une faible efficacité, Macron engage une restructuration profonde de l’institution. Il espère ainsi simplifier et raccourcir les délais de traitement des affaires, permettant la conciliation des deux partis pour éviter d’avoir recours au procès. Il n’est pas lieu ici de donner des moyens permettant aux prud’hommes de fonctionner correctement mais de les dilapider en renforçant le pouvoir des juges face aux conseillers et de diminuer la protection de cette instance pour les salariés.

Les mécanismes du capitalisme sont implacables et dans ce contexte où la crise fait rage, issue des contradictions du système, les avancées sociales sont devenues des obstacles aux  lois intrinsèques du marché. Cette loi témoigne de deux choses, d’une part la faiblesse idéologique du gouvernement – et dans une plus large mesure du PS, frondeurs compris malgré leur gesticulation face à cette loi – qui s’en remet aux idées du MEDEF en matière de politique économique, devenant ainsi ouvertement les éléments conscients de la classe capitaliste. D’autre part, ces mesures sont inévitables dans les limites du système capitaliste. Il faut détruire les acquis des travailleurs les uns après les autres pour préserver les intérêts de la classe dominante. Le capitalisme et la recherche de la « croissance » signifient désormais recul social, émancipation du patronat vis-à-vis du Code du travail. Il n’y pas d’autre choix pour les travailleurs que de combattre le système capitaliste et tous ses serviteurs, s’ils veulent en finir avec la régression sociale impulsée par ce gouvernement qui sert le système en place.

Gauthier Hordel

PCF Rouen

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