Matthieu, lundi et mardi ont eu lieu le premier round de la grève contre la casse du service public à la SNCF. Étiez-vous nombreux à vous mobiliser à Versailles ?
La grève a été extrêmement suivie sur notre site, comme dans tout le pays. Tous les corps de métiers avaient très largement cessé le travail, y compris une très grande partie des membres de l’encadrement qui jusqu’à présent ne s’inscrivaient jamais dans de tels mouvements. 70 grévistes étaient à l’Assemblée Générale le 03 avril, ce qui, sur notre site et compte tenu des conditions de transport très difficiles, est un très haut niveau de mobilisation, ce qui prouve que les cheminots de Versailles veulent s’approprier leur mouvement.
Quelles sont les principales revendications ?
La première revendication est le retrait du projet de “pacte ferroviaire” Spinetta-Macron. Ce plan vise à casser le statut cheminot, conquis de hautes luttes par nos anciens, à privatiser la SNCF et à livrer le réseau ferré national à des opérateurs privés. Ce n’est pas une “ouverture à la concurrence”, c’est la transformation de notre monopole public historique du rail en monopole privé, ligne par ligne, région par région. Nous revendiquons la défense et le renforcement du monopole public SNCF, la reprise de sa dette par l’État, le maintien et l’extension d’un statut de haut niveau pour tous les travailleurs du rail.
Que penses-tu de la stratégie de la grève perlée ? Le mouvement peut-il se durcir ?
Mon syndicat (CGT cheminots de Versailles) et moi-même étions demandeurs d’une grève reconductible par tranche de 24h, lors de la consultation de la Fédération CGT des cheminots. La stratégie de la grève perlée (2 jours tous les 3 jours) est la décision majoritaire issue des consultations. Il n’en reste pas moins que les cheminots se sont emparés de ces modalités originales afin de paralyser la production le plus possible en faisant durer le combat le plus longtemps possible. Et ça marche ! Par exemple : sur la ligne C du RER, aucun train ne circule pendant les cycles de 48h de grève et il n’y a pas plus de 3 trains sur 5 pendant les cycles de 3 jours de “non grève”. C’est la preuve que la puissance du mouvement gréviste amène une paralysie générale de la production. Ce n’est pas 36 jours de grève qui attendent le gouvernement Macron mais bien 3 mois de service extrêmement dégradé. C’est par nos actions coup de poing, notre mobilisation de tous les jours, que nous pourrons durcir et gagner le bras de fer contre ce gouvernement au service du cahier revendicatif du MEDEF.
Quelles actions avez-vous prévues ?
Le syndicat CGT des cheminots de Versailles a mis en place un calendrier d’actions afin que les cheminots puissent exprimer leur colère et leurs revendications chaque jour de grève, avec une visibilité maximale : défilés dans les gares, manifestations, blocages, occupations, péages gratuits, meetings… Ce ne sera pas une grève “apéro merguez” mais une grève active pour permettre aux cheminots de prendre en main leur mouvement de contestation et, peut-être, entraîner les autres corporations derrière eux.
Y a-t-il une convergence des luttes selon toi ?
Il y en a la volonté, en tout cas dans de nombreuses corporations, et il ne faut pas sous-estimer le puissant mouvement dans les EPHAD, des salariés de Carrefour, la grève importante des fonctionnaires du 22 mars dernier, le blocage de nombreuses universités par les étudiants, la mobilisation des électriciens et gaziers, celle des agents du nettoiement et du traitement des déchets… Salariés du privé comme du public, retraités, chômeurs, étudiants : nous sommes tous les cibles du thatchérisme social incarné par Macron et nous avons tous intérêt à nous défendre et contre attaquer ensemble plutôt que perdre chacun dans notre coin.
Quel débouché politique doit-il y avoir derrière ces luttes ?
L’horizon politique semble assez bouché, entre posture et attentisme. Nous avons tous besoin d’un grand parti communiste, d’un véritable parti du Travail, un parti de classe, de masse et révolutionnaire pour donner à nos luttes un débouché politique face au pouvoir d’un gouvernement au service du capital !