L’« identité nationale » au secours du gouvernement

Interviewé dans le cadre de l’émission L’objet du scandale, (France 2), le « profiler » Eric Besson a tout bonnement déclaré : « Je suis là pour être une espèce de machine à fabriquer des citoyens rationnels, qui adhèrent aux valeurs de la république française, qui adhèrent à notre identité nationale. » Le ministre et son chef suprême Sarkozy proposent de définir le profil type du parfait petit Français. Cela permettra de savoir qui a « toute sa place », en France – et, plus important encore, qui ne l’a pas !

A La Chapelle-en-Vercors, dans un discours où les mots travail, famille et patrie ont – comme par hasard – beaucoup résonné, Nicolas Sarkozy nous a informés que « devenir Français, c’est adhérer à une forme de civilisation, à des valeurs, à des mœurs ». Par la suite, il nous a donné un excellent exemple de cette moralité hypocrite dont il voudrait faire le socle de la nation toute entière : « On ne peut pas vouloir bénéficier des allocations-chômage sans se sentir moralement obligé de tout faire pour retrouver du travail, parce que les allocations sont payées par les autres. »

On ne peut pas nier le fait que les chômeurs, par définition, ne travaillent pas. Ils sont le produit d’une « machine à fabriquer » des chômeurs rationnels. Ce sont les victimes de ceux qui ont très « moralement » amassé des fortunes en les exploitant, avant de les jeter tout aussi moralement dans la rue, quand ils n’en avaient plus besoin. Les chômeurs d’aujourd’hui sont les travailleurs d’hier, ceux qui auraient voulu conserver leur emploi mais l’ont perdu à cause des licenciements massifs, des fermetures d’entreprises, des délocalisations et du démantèlement des services publics que les riches se sentent « moralement obligés » d’imposer pour s’enrichir davantage. Rappelons aussi que les sommes colossales d’argent public versées dans les coffres des entreprises capitalistes et des banques – oui, les mêmes qui licencient ! – sont infiniment plus importantes que les maigres indemnités des chômeurs. Or ces sommes sont, elles aussi, « payées par les autres », avec en prime des intérêts !

Sarkozy a promis de réduire le chômage. Le chômage augmente en flèche. Il a promis de réduire les inégalités. Le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté ne cesse de croître. Il a promis la croissance économique. L’économie s’est effondrée. La démarche de Sarkozy-Besson est donc parfaitement « rationnelle », du point de vue de la classe capitaliste. Bien évidemment, dans la perspective des élections régionales, l’UMP veut draguer dans les eaux du Front National. Mais au-delà de ces considérations électorales, Sarkozy cherche à attiser le sentiment « national » et raciste pour faire diversion. Il importe au gouvernement de trouver des boucs émissaires. Il faut diviser les travailleurs, dresser ceux dont les « valeurs et les mœurs » seraient « français » contre les autres, jugés non conformes. En clair, le ministère de l’identité nationale dirigé par Besson est une « machine à fabriquer » des préjugés racistes, une machine à diviser et à exclure.

L’objectif du gouvernement, c’est que le travailleur qui perd son emploi n’en veuille pas aux capitalistes de l’avoir flanqué à la porte, mais aux Magrébins et autres « étrangers » qui « mangent le pain des Français ». Assurément, la famille expulsée de son logement se sentira moins affligée si l’opération pouvait se faire sur fond de Marseillaise. La fermeture d’une entreprise qui place des centaines de salariés, comme le précise Sarkozy, « dans l’obligation morale » de se faire embaucher par une autre, serait certainement mieux vécue en présence d’un drapeau tricolore. Le ramassage matinal des cadavres de ceux qui, cet hiver comme l’hiver dernier, mourront de froid et de faim, sera plus gérable pour peu qu’on connaisse leur « identité nationale ». Puisque le capitalisme ne peut pas répondre aux besoins essentiels de la population, puisqu’il impose la régression sociale et l’appauvrissement du plus grand nombre, il veut nourrir ses victimes avec… de l’orgueil national.

Greg Oxley (PCF Paris 10e)

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