Deux questions à Didier Gaudefroy, cheminot CGT à Toulouse

La Riposte : Depuis le début de la lutte contre les régimes spéciaux, le gouvernement et la direction de la SNCF fustigent le « corporatisme » des cheminots. Que répondez-vous ?

Didier G : Le régime spécial de retraite et le statut des cheminots trouvent leurs fondements dans les contraintes du service public – continuité de service 365 jours par an, 24 heures sur 24 –, dans la spécificité des tâches et dans les responsabilités liées à la sécurité des circulations.

Il faut savoir que les cheminots se paient leurs avantages particuliers par l’intermédiaire d’une cotisation retraite beaucoup plus importante que celle des salariés du régime général : la cotisation des cheminots est de 42,3 % de la masse salariale, contre 29,42 % de la masse salariale pour le régime général.

Par ailleurs, le financement de nos retraites repose sur le rapport entre le nombre d’actifs et de retraités. Or la stratégie désastreuse de la SNCF, en matière d’emploi, n’est pas le fait des cheminots, qui se battent souvent contre ces choix destructeurs, mais celui de la direction et des pouvoirs publics. Rien qu’entre 2002 et 2007, 16 000 emplois ont été supprimés.

Plus généralement, ce sont tous les régimes spéciaux qui sont visés sous le fallacieux prétexte de « l’équité ». Le gouvernement a dans ses projets une augmentation de la durée de cotisation pour tous les salariés, à l’horizon 2008.

Lors des précédentes réformes des retraites – en 1993 et en 2003 – la justification avancée par les gouvernements était d’assurer un financement durable des caisses de retraite. Aujourd’hui, on nous explique que les réformes de 1993 et 2003 n’ont rien réglé sur ce plan, et qu’il va falloir revenir à la charge. Par contre, ces réformes ont aggravé les conditions d’accès à la retraite, pour les salariés.

La Riposte : Avez-vous d’autres revendications ?

Didier G : Oui. Et précisément, le gouvernement et la direction de la SNCF, relayés par les médias, occultent les autres revendications des cheminots dans le but de présenter notre lutte comme une défense d’intérêts corporatistes. Il s’agit de dresser la population contre les cheminots et tous les autres salariés bénéficiant d’un régime spécial.

La CGT pose plusieurs revendications qui sont toutes liées entre elles. Nous défendons le maintien de l’entreprise publique. Or la direction veut filialiser l’activité « fret » de l’entreprise. C’est pourquoi l’avenir du fret ferroviaire est aussi à l’ordre du jour, car la direction de la SNCF met en danger cette part très importante de l’entreprise. Le plan de « Sauvetage du fret » qui vient d’être appliqué (2003/2006) a abouti au sombre exploit de faire baisser le volume du fret ferroviaire en transférant l’équivalent de 1,5 millions de camions sur les routes ! La direction diminue volontairement le fret, et ce dans une période où les préoccupations environnementales sont supposées être une priorité… Les actes démentent les paroles. Il est question de fermer 262 gares au fret. D’où nos revendications concernant l’emploi, une question primordiale pour améliorer le fonctionnement de l’entreprise et développer son potentiel de transport.

Nous revendiquons aussi des augmentations générales de salaires, parce que les cheminots ne sont pas des privilégiés du monde du travail. Un grand nombre d’entre eux ont des salaires oscillants entre le SMIC et 1500 € nets. Ils ont donc de grandes difficultés pour vivre correctement, dans un contexte où les produits de première nécessité sont en forte hausse.

Nous nous battons pour l’avenir de l’entreprise, pour le service public, pour l’intérêt collectif. Sur les retraites, la CGT souhaite qu’il y ait un grand débat pour que tous les salariés aient les éléments en main. La réforme que nous soutenons doit permettre de renforcer les droits des salariés. Il faut garantir un départ en retraite à 60 ans à taux plein, sur un montant de retraite correspondant à 75% du dernier salaire. Il faut également valider les années d’études dans le calcul du temps de cotisation, anticiper le départ en retraite des salariés soumis aux travaux pénibles et mettre en œuvre un système de cotisations favorisant l’emploi et les salaires.

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