Sur la nature du mouvement des médecins contre la loi santé

Malgré l’opposition de médecins libéraux fortement mobilisés depuis plusieurs mois, la loi santé de Marisol Touraine, ministre de la santé du gouvernement de François Hollande, a définitivement été adoptée par l’Assemblée Nationale le 17 décembre 2015. Suite aux attentats du 13 Novembre, le front syndical de médecins libéraux avait mis son mouvement en suspens alors même qu’il s’apprêtait à le renforcer. La focalisation politique et médiatique sur la lutte contre le terrorisme, ainsi que le contexte de l’état d’urgence, ont offert  l’occasion de voter cette loi dans l’indifférence générale. La ministre ne s’en est pas privé. Excédés, les syndicats entendent bien prendre leur revanche et s’appuyer sur la mobilisation construite en réaction à la loi santé pour faire pression à l’approche de la prochaine échéance : la négociation conventionnelle qui devraient se tenir en février 2016, au cours de laquelle ils comptent défendre l’augmentation du prix de la consultation à 25 euros.

La lutte des médecins contre la loi Santé: un mouvement progressiste ?

Une fois n’est pas coutume chez les médecins, on a pu observer une quasi-unité syndicale à la tête de ce mouvement. Ils ont battu le pavé, ont fait « grève », ont sorti mégaphones, tracts, flyers et sont allés jusqu’à lancer des appels à la « désobéissance » pour résister au gouvernement. Indéniablement, le rejet de la loi est majoritaire dans la profession, comme en témoignent les forts taux de participation aux mouvements de grèves : 75% des cabinets étaient fermés le 13 novembre 2015, selon un des syndicats. Pourtant, comme nous l’a rappelé  « la manif pour tous », on ne peut juger du caractère progressiste d’un mouvement au simple nombre de participants impliqués ou de sa combativité face à la politique d’un gouvernement contre lequel nous sommes également en lutte. Il faut se pencher sur les revendications, les méthodes de lutte et les forces sociales mises en mouvement pour pouvoir en déterminer sa nature. En l’occurrence, les mots d’ordres mis en avant étaient choisis avec précaution pour semer l’illusion qu’ils se mobilisaient avant tout pour défendre l’intérêt des patients et la « liberté » des soignants. Mais en y regardant de plus près, on constate qu’il s’agit bel et bien d’un mouvement corporatiste : ce qu’ils cherchent à défendre avant tout, ce sont leurs propres intérêts.

Tiers-payant, trou de la sécu et «responsabilisation » des usagers

La situation est d’autant moins claire que les libéraux eux-mêmes entretiennent la confusion pour gagner la sympathie de l’opinion publique. La question du tiers-payant généralisé obligatoire est le meilleur exemple de cette stratégie de communication flirtant avec la manipulation. Conscients que la mesure n’est pas en soi impopulaire et qu’il est délicat d’expliquer que leur profession se mobilise, en fin de compte, pour que les patients continuent d’avancer les frais, les médecins ont mis en retrait cette revendication ou l’ont noyée au milieu d’autres griefs vis-à-vis de cette loi. Pourtant, il s’agit bien du point de désaccord qui cimente le front syndical. Les arguments avancés sont de deux ordres. Le premier est celui que l’on ressort à chaque fois qu’il faut justifier l’apparition ou l’augmentation des restes à charge des patients (ticket modérateur, etc.) : faire payer le patient, c’est le responsabiliser. A les entendre, le fait de débourser 23 euros en fin de consultation est ce qui donne de la valeur à la consultation. Ces 23 euros sont le barrage contre un flot de dépenses incontrôlées. Sans avoir à sortir leur porte-monnaie, les gens seraient pris d’une gourmande envie de soins superflus, comme un client de magasin en période de solde céderait à une pulsion consommatrice sans réelle nécessité. L’augmentation des dépenses qui en découlerait serait alors fatale pour le système de la sécurité sociale, déjà au bord de la banqueroute. Sans toujours l’avouer publiquement, nombreux sont les médecins qui reprennent à leur compte cette « menace » mise en avant par les politiciens-professionnels de la casse du service public et largement colportée par les médias. Mais les usagers ont bon dos et servent, comme nous allons le voir, d’épouvantails pour masquer les principaux responsables du déséquilibre budgétaire de la sécurité sociale.

Le problème du financement de la sécurité sociale présente deux versants : celui des dépenses et celui des recettes1. Du côté des dépenses d’abord : ce qui est pointé du doigt est la fraude aux prestations. Celle-ci est estimée entre 2 et 4 milliards d’euros, soit moins de 1% du budget de la sécurité sociale. Et si l’on regarde en détail qui sont ces fraudeurs, on constate que 70% de cette somme, sous la forme de surfacturation, fraudes à la nomenclature, etc ., provient des soignants et des établissements de santé ! Les 30% restant sont les « fraudeurs » dont on nous parle à la télé : falsifications de carte vitale, RSA perçu alors qu’on n’y a pas droit, « escroquerie » aux indemnités journalières, etc. Parmi eux, nombreux sont détectés et les sommes dues récupérées par la sécurité sociale. La fraude «effective » est donc encore en deçà. Nous voyons donc que comparé à l’espace médiatique et politique que ces dépenses occupent, on se situe hors de toutes proportion rationnelle. De plus, ceux qui dénoncent ces fraudeurs se gardent bien de parler des usagers qui ne recourent pas aux prestations auxquelles ils auraient pourtant droit : par manque d’information, à cause de la complexité des démarches ou par crainte de passer pour un « profiteur » du système, on estime que près de 10 milliards de prestations seraient inutilisées.

Si l’on reste du côté des coûts, il faut se pencher également sur un autre poste de dépense conséquent et potentiellement beaucoup plus compressible, celui du remboursement des médicaments: 23 milliards d’euro en 20142. Le prix des médicaments est négocié entre la firme qui le produit et les pouvoirs publics. Du point de vue du laboratoire, il faut obtenir le prix le plus élevé possible. Il dispose pour cela d’un arsenal de méthodes, plus ou moins légales, dont les scandales concernant des conflits d’intérêts ne représentent que la partie émergée de l’iceberg. Officiellement, le prix est le reflet des années d’effort en recherche et développement nécessaire pour pouvoir apporter à la société une molécule innovante. En réalité, la firme va dépenser en moyenne 2 fois plus d’argent pour promouvoir son médicament que pour le mettre au point. Et quelles que soient les qualités de la molécule mises sur le marché, le laboratoire n’a qu’un impératif : dégager une marge suffisante pour satisfaire les actionnaires. La recherche est donc orientée vers les débouchés rentables. Ce critère -répondre à l’intérêt privé- prend le pas sur les problèmes de santé publique, c’est à dire l’intérêt collectif. Pire, la rentabilité sera assurée en grande partie par de l’argent public, via le remboursement par l’assurance maladie et, dans une moindre mesure, par les crédits d’impôt, autre cadeau du gouvernement. Cette contradiction entre intérêts privés et intérêt collectif éclate parfois sur le devant de la scène, comme en 2015 lorsqu’a été mis sur le marché un nouveau traitement contre l’hépatite C à 39 000 euro la cure de 3 mois. En aval de la recherche et de la fixation du prix des médicaments, l’industrie pharmaceutique exerce également une lourde influence sur les pratiques et les prescriptions des médecins. Des années de présence sur le terrain lui ont permis de tisser des liens très fort avec le milieu médical. Congrès tous frais payés, rémunération en contrepartie d’animation de conférences, de rédaction d’articles (auteurs « fantômes ») ou  pour une simple signature (auteurs « honorifiques »), babioles, promotion de leader d’opinion au discours convenable, financement d’association de patients, « sponsor » de carrière, pot de thèse… La majorité des médecins y voit là une relation « gagnant-gagnant ». Mais il faut être aveugle pour ne pas voir que ces millions et millions d’euros ne sont investis par le laboratoire que dans un seul but: influencer les prescriptions pour booster les ventes de leurs molécules. Cette pression vers le « tout-médicamenteux » laisse en jachère tout un pan de la santé publique, celui de la médecine préventive, et fait obstacle aux réflexions autour de la iatrogénie (les effets indésirables dus aux traitements) et au développement des prises en charges non-médicamenteuses. Tant qu’elle sera entre les mains de la bourgeoisie, on ne pourra attendre de l’industrie pharmaceutique qu’une stratégie commerciale, pas de plan de santé publique. A ses débuts, cela suffisait pour obtenir malgré tout de grands progrès thérapeutiques. De nos jours, les mécanismes de l’économie de marché constituent un obstacle au développement des forces productives. Il ne s’agit pas là d’une simple formule. En pratique, cela se traduit par un essoufflement de la recherche : parmi les centaines de molécules mises sur le marché chaque année, une poignée seulement apportent une amélioration thérapeutique significative. Sur la rapacité de l’industrie pharmaceutique et l’impasse des stratégies de rentabilité en cours terme, le front syndical ne porte aucune revendication. Tout comme sur la lutte contre l’influence de l’industrie pharmaceutique en général en fait. Par ce silence, le front syndical rejoint le gouvernement pour défendre une position commune : il n’est pas question de remettre en cause l’emprise des intérêts privés sur les problèmes de santé publique.

Enfin, cette histoire de responsabilisation des patients est aussi destinée à nous détourner de l’autre versant du problème du déficit de la sécurité sociale : les recettes. Le financement de l’assurance maladie repose en premier lieu sur les cotisations sur les salaires, les fameuses « charges » patronales. Sous la pression du patronat ou incarnant directement leurs intérêts, les gouvernements procèdent chaque année à des exonérations fiscales, partiellement compensées par l’Etat : le manque à gagner net pour la sécurité sociale est de 3 milliards d’euros par an. Par ailleurs, pour éviter ces cotisations, les grandes entreprises développent d’autres modes de rémunération que les salaires, comme les stock-options : un manque à gagner estimé à 6,5 milliards d’euros pour l’année 2013. Enfin, la fraude aux cotisations sociales : 10 à 12% des entreprises seraient en infraction, pour une somme totale estimée à 20 milliards d’euros, soit un montant de 5 à 10 fois plus élevé que la fraude aux prestations ! Ce manque à gagner, près de 30 milliards cumulés, est à mettre en parallèle avec le trou de la sécu : 13,2 milliards d’euro en 2014 pour le régime général.

Si le front syndical tient à sauver une sécurité sociale malade, grand bien lui fasse. Mais alors qu’il prenne soin de porter le bon diagnostic. Oui, il y a des gens qui vivent -et s’enrichissent- sur le dos de la société : les grands actionnaires de l’industrie pharmaceutique. Oui, il y a des fraudeurs, au premier rang desquels on trouve, loin devant, les entrepreneurs qui ne paient pas leurs cotisations sociales. Oui, il y a des irresponsables : les politiciens qui lancent publiquement la chasse aux pauvres et distribuent en coulisse des cadeaux fiscaux aux rois de l’évasion.

Le tiers-payant généralisé: source de travail administratif supplémentaire

Le second argument est celui du tracas administratif que cela engendrerait : gérer le tiers-payant, c’est gérer les refus de paiement. Il faut reconnaître que cet argument est tout à fait recevable: les médecins libéraux accumulent déjà de nombreuses tâches administratives, pas toutes en lien avec l’assurance maladie d’ailleurs puisqu’une partie non négligeable est liée à leur statut de profession libérale. Avec la loi Santé, la gestion du recouvrement de la part complémentaire -la partie non remboursée par l’assurance maladie publique- serait laissée aux mains des médecins. Contrôler les facturations, entrer en lien avec les complémentaires en cas de problème ou payer un service pour s’en occuper : la ministre offre une nouvelle responsabilité aux médecins. Visiblement ils s’en passeraient bien. Quelle ingratitude ! Eux qui défendent la liberté, ils s’opposent à ce que la sécu les laisse libre de gérer les impayés comme ils le désirent! Enfin, admettons qu’ils rejettent cette liberté. Soit. Mais alors pourquoi jeter le bébé avec l’eau du bain et s’opposer à une amélioration de l’accès aux soins pour un problème d’ordre administratif ? Sans attendre d’eux des positions révolutionnaires, ils pourraient revendiquer, comme le fait le Syndicat de la Médecine Générale -seul syndicat de gauche de médecins généralistes- la création d’un guichet unique à l’assurance maladie, à qui reviendrait la tâche de payer le médecin et de s’occuper de gérer les impayés auprès des différentes caisses et des complémentaires privées. Le médecin n’aurait alors plus qu’à faire passer la carte vitale dans son lecteur, l’assurance maladie lui virerait le prix de la consultation dans les jours qui suivent. C’est une mesure compatible avec le système actuel. Cependant, de notre point de vue, cela reste insuffisant. Une telle mesure ne remet pas en question la place du secteur privé. Et après tout, il y a un moyen encore plus simple de résoudre la question du recouvrement : la prise en charge à 100% de tous les soins par l’assurance maladie. Cette dernière n’aurait alors plus à s’organiser pour réclamer auprès des complémentaires privées. Et puisque les médecins semblent tenir à éviter les tracas administratifs, nous leur disons : « rejoignez nous, camarades, nous sommes pour le paiement à la fonction! ».

Oui mais voilà, ils sont contre « l’étatisation de la médecine ». Ou, plus jolie formule, ils sont pour « l’indépendance » de leur profession. Mais quelle indépendance défendent ces syndicats ? En tout cas pas celle des professionnels de santé vis à vis des laboratoires ! De plus, ces mêmes syndicats, qui déclarent à qui veut l’entendre leur affection pour notre système de santé, ne bougent pas le petit doigt pour s’opposer à la casse du service public, ne montrent aucun signe de solidarité avec les campagnes de lutte contre « l’hôstérité » (l’austérité appliquée au secteur hospitalier) menées par les syndicats de salariés du secteur hospitalier. Ils ne défendent que leurs propres intérêts : celle d’une classe petite bourgeoise, libérale et conservatrice.

Cependant, ce constat concernant les mots d’ordres et les dirigeants du front syndical ne peut être aussi sévère pour l’ensemble des participants au mouvement sans tomber dans la caricature. Si les appels à la mobilisation des dirigeants syndicaux sont autant suivis et le mouvement a connu une telle ampleur, c’est qu’il traduit également une profonde exaspération dans le milieu de la médecine générale. Les conditions d’exercice sont difficiles : surcharge de travail, désertification médicale, absence de coordination, isolement professionnel, etc.  De plus, alors que la filière généraliste représente plus de la moitié des professionnels, celle-ci reste sous-dotée en matière de recherche, d’enseignement et de financement. Paradoxalement, comme le rappelle le SMG, cette souffrance et ce malaise de la profession sont clairement la conséquence d’un laisser-faire libéral dans le champ des soins de premiers recours.

Ainsi, le front syndical constitue l’opposition de droite à la loi santé. Il incarne les intérêts d’une pratique libérale à la vision étroite, conservatrice, qui arrive à cristalliser le malaise d’une profession, prête à se rallier au mot d’ordre « comme avant, c’était mieux ». Mais tant les propositions du front syndical que celles du gouvernement n’apporteront aucune solution aux problèmes de fond qui font des soins de premier recours un secteur en crise.

Un mouvement d’opposition de gauche embryonnaire

Il existe au sein de la profession médicale une opposition de gauche incarnée par le Syndicat de la Médecine Générale. D’une taille très modeste, il n’en reste pas moins que ses positions cherchent à refléter les intérêts de l’ensemble des travailleurs. Comme l’explique ce syndicat3, au delà du tiers-payant, la loi prévoit toute une série de mesures assez diverses, dont certaines avancées notables, comme la suppression du délai de réflexion obligatoire de 7 jours pour l’IVG, le droit à l’oubli pour les pathologies cancéreuses ou la possibilité d’actions judiciaires de groupe. Mais  on ne peut pas parler pour autant de loi fourre-tout où le bon côtoie le mauvais, car il y a bien une cohérence globale derrière toutes les séries de mesures contenues dans cette loi : la réduction des dépenses publiques de santé et son ouverture au secteur privé.

Comme le SMG le dénonce dans ses articles, le gouvernement met en avant le tiers payant comme mesure de justice sociale et de l’autre continue la mise à sac du service public. La mise en place du tiers-payant généralisé, pas avant novembre 2017, ne doit pas faire occulter que les franchises ne sont pas remises en question, ni les dépassements d’honoraires, et que la loi ne garantit aucunement que les soins dentaires, ophtalmologiques ou auditifs soient enfin à la portée de tous. Concernant l’influence de l’industrie pharmaceutique, la lutte contre les conflits d’intérêts n’était même pas abordée dans le projet initial. Des amendements ont été ajoutés par la suite mais ne font que reprendre les mesures de transparence déjà existantes -et peu respectées. L’élargissement de l’accès aux données médicales aux professionnels « médico-sociaux » et « sociaux », aux groupements inter-hospitaliers et la relance du Dossier Médical Partagé mettent le secret médical en péril en augmentant les intervenants ayant un accès aux données de santé d’un patient alors que ce dernier est censé pouvoir exercer un contrôle sur ce partage d’information. Les données d’hospitalisation,  théoriquement anonymisées, sont déjà ouvertes et peuvent être achetées. Dans les faits, l’anonymat n’est pas garanti puisque le recoupement et le traitement de ces données permettent très souvent l’identification des patients. La loi étend pourtant l’ouverture aux données anonymisées du secteur ambulatoire. On imagine sans peine l’intérêt qu’elles représentent pour les assureurs et l’industrie pharmaceutique, dans le but d’optimiser leurs stratégies commerciales et financières. Enfin, la loi prévoit, dès le 1er article, de donner une place accrue aux organismes de complémentaires santé qui sont « appelés à contribuer de façon décisive à la politique de santé ». Du point de vue des politiques qui organisent la casse du la sécurité sociale, le tiers payant généralisé présente l’avantage de masquer le ratio remboursement public/remboursement privé. Ainsi, ceux qui prendront le relais de Marisol Touraine pourront espérer diminuer la part publique et augmenter la part complémentaire sans faire trop de vagues puisque, dans l’immédiat, cela ne changera rien pour le patient. Le renforcement des complémentaires qui en découlera pourrait déboucher, à terme, sur la contractualisation des médecins non seulement avec l’assurance maladie obligatoire, mais aussi avec les complémentaires, le patient ayant accès aux médecins « agrées » par son assurance s’il veut être remboursé, comme pour les mécaniciens avec les sinistres automobiles.

Cette loi n’apportera aucune solution aux problèmes structurels de la médecine de premier recours, aucun soulagement au malaise des soignants, ne résoudra aucun des problèmes cruciaux de l’accès aux soins pour les patients. Même si l’intention y était, notre système de santé publique a besoin de bien plus que de quelques réformes. Son organisation de base doit être repensée pour reposer sur des établissements de soins primaires publics, inspirés de ce que l’on appelle actuellement les Centres de Santé, répartis de manière rationnelle sur l’ensemble du territoire. Le secteur 2 doit être aboli, le paiement à l’acte doit être abandonné pour une rémunération à la fonction. La mise en place du tiers payant généralisé doit s’accompagner d’une prise en charge à 100 % de tous les soins par l’assurance maladie et la création d’un guichet unique. Les complémentaires privées, devenues inutiles, doivent être nationalisées: les cotisations en cours seraient remboursées, le reste irait dans les caisses de l’assurance maladie plutôt que dans les comptes en banque des actionnaires. Les recettes de la sécurité sociale doivent être garanties, pour commencer en supprimant les cadeaux fiscaux aux employeurs. Les moyens alloués à la lutte contre la fraude doivent être à la mesure de celle-ci. L’industrie pharmaceutique doit être libérée des contraintes de l’économie de marché: elle doit être nationalisé pour en faire un service public démocratique, c’est à dire sous la gestion directe des salariés et de la population. Sous leur contrôle, il sera possible d’orienter la recherche vers les intérêts de tous, les conflits d’intérêts majeurs s’éteindront et les prix des médicaments pourront être considérablement diminués.

Personne ne doute que ce programme se heurtera à l’opposition implacable des grands actionnaires, qui aiment investir dans le secteur de la santé pour ses taux de profits particulièrement attractifs. Mais ils ne seront pas les seuls : ce mouvement a démontré que ces mesures devront aussi faire face à la vieille garde libérale des représentants de la médecine générale. Son application complète et définitive n’est en fait possible que dans un contexte de mobilisation massive de la jeunesse et des travailleurs, en s’appuyant sur l’aile gauche de la profession et en agissant « avec tact et mesure » pour en gagner la majorité. Seule la force d’une mobilisation révolutionnaire pourra être à même de briser la résistance des capitalistes et, en les isolant, celle des irréductibles libéraux. Seule la vigueur et l’enthousiasme d’un mouvement révolutionnaire sera à même de transmettre le souffle des idées nouvelles à la majorité des médecins hésitants, sur lesquels pèse le poids des habitudes du passé. Dans le communiqué de presse du front syndical appelant à la mobilisation générale à partir du 13 novembre4 on pouvait y lire cette revendication dangereuse : « Les médecins libéraux revendiquent d’être les organisateurs de leurs territoires de santé. » La santé publique est une chose trop importante pour être laissée entre les mains des médecins!

Boris CAMPOS

PCF

Janvier 2016

Notes :

1 La plupart des chiffres issu de ce chapitre sont issu du rapport de la cours des compte de septembre 2014. Voir aussi: http://www.outilsdusoin.fr/spip.php?article157#forum214

2 http://www.securite-sociale.fr/Depenses-de-medicaments-2014-et-1er-semestre-2015?type=presse

3 Voir entre autre: http://www.smg-pratiques.info/Analyse-du-SMG-du-projet-de-loi.html

4http://www.mgfrance.org/index.php/presse/communiques/1251-unite-syndicale-chez-les-medecins-liberaux-pour-une-mobilisation-generale-a-partir-du-13-novembre

Note : Le 21 janvier 2016, soit après la rédaction de l’article, le conseil constitutionnel est revenu sur la loi pour modifier partiellement la question du tiers payant. Du tiers payant généralisé obligatoire on est passé au tiers payant facultatif sur la part obligatoire. Autrement dit, rien n’a changé !

Voir le communiqué de presse du SMG pour plus de détail: http://www.smg-pratiques.info/Le-seul-tiers-payant-valable-pour.html

 

 

 

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