Ce texte de Greg Oxley est la préface de notre édition du chef d’œuvre de Léon Trotsky.
C’est en 1936, dans son exil norvégien, que Trotsky achève le livre qu’il voulait intituler Où va la Russie ?, et que son éditeur français a rebaptisé La révolution trahie. D’après sa correspondance avec Max Eastman, il semblerait que l’ouvrage ait pris forme à partir de la préparation, à la demande de ce dernier, d’une préface pour une nouvelle édition de son Histoire de la révolution russe. Trotsky comprenait la nécessité de fournir une analyse marxiste approfondie de la dégénérescence bureaucratique du régime issu de la révolution d’Octobre 1917. De ses lieux d’exil successifs et jusqu’à son assassinat par un agent de Staline, en août 1940, il s’efforçait d’armer les communistes et le mouvement ouvrier international d’une explication de la réalité de l’URSS, de sa nature sociale et de ses perspectives de développement ultérieur. Il avait écrit de nombreux articles importants sur ce thème, dont État ouvrier, thermidor et bonapartisme (1935). Mais dans La révolution trahie, Trotsky présentait pour la première fois une analyse exhaustive des causes profondes – économiques, sociales et politiques – du « stalinisme ».
Aujourd’hui, la nécessité de comprendre ce phénomène n’a rien perdu de son actualité. Parmi tous les arguments qu’utilisent les défenseurs du capitalisme, lorsqu’ils cherchent à discréditer le communisme, la dictature stalinienne occupe une place centrale. Ils la présentent comme un développement inhérent au socialisme et une conséquence inéluctable de l’abolition de la propriété capitaliste. La société doit nécessairement se diviser en oppresseurs et opprimés. Il y va de la « nature humaine » ! L’expérience soviétique n’en est-elle pas la preuve ?
En agitant le spectre de la dictature stalinienne, ils veulent discréditer la révolution de 1917, qui a permis de jeter les bases d’une société débarrassée des capitalistes. Voilà ce qui explique l’hostilité implacable des capitalistes du monde entier à l’égard de la révolution russe et de l’URSS. Certes, après avoir détruit l’ancien régime, après avoir lutté pour défendre la révolution contre ses ennemis, les révolutionnaires russes n’ont pas pu empêcher la dégénérescence bureaucratique de l’État soviétique et du parti bolchevik. Mais cela ne signifie pas que cette révolution n’ait rien à nous apprendre. Bien au contraire : elle recèle de précieux enseignements pour tous ceux qui, à notre époque, aspirent à participer activement et consciemment à la lutte contre le capitalisme.
Lénine expliquait que sous l’impact de la première guerre mondiale, la chaîne capitaliste s’était brisée à son maillon le plus faible. La configuration géographique de la Russie des tsars lui imposait un développement lent et inégal. La classe sociale prépondérante était la paysannerie. En 1800, sur une population totale de 36 millions, 34 millions étaient des serfs. Quand le servage fut aboli, en 1861, les paysans « libres » devaient payer une redevance pour obtenir des terres. Le résultat fut la création d’une masse immense de vagabonds et de miséreux. La majorité de la population vivait dans une extrême pauvreté. L’administration tsariste, l’aristocratie et les capitalistes assuraient leur domination au moyen d’une oppression brutale et arbitraire : massacres, tortures et pendaisons. Ce régime despotique offrait des avantages considérables aux investisseurs étrangers – et notamment une main d’œuvre bon marché qu’ils pouvaient traiter comme des bêtes de somme. En 1914, un tiers des capitaux investis en Russie était d’origine européenne ou américaine. Les capitalistes français, par exemple, possédaient plus de la moitié des mines de fer et de charbon. En 1917, après trois ans de carnage impérialiste, c’est dans ce pays économiquement et culturellement arriéré que les travailleurs, les soldats et les paysans pauvres se soulevèrent en masse pour mettre fin à la guerre et à l’oppression.
Après cinq jours de grève insurrectionnelle, en février 1917, la monarchie fut renversée. Au cours de cette première phase de la révolution, des assemblées générales composées de délégués démocratiquement élus – les soviets – ont été créés par les travailleurs et les soldats, à une échelle plus vaste que lors de la révolution de 1905. Les gouvernements successifs, liés aux capitalistes et soutenus par les mencheviks et socialistes-révolutionnaires, à la tête des soviets, se montrèrent incapables de résoudre les problèmes des masses. Sous la direction de Lénine, le parti bolchévik prônait la prise du pouvoir par les soviets. Très minoritaires dans les premiers mois de la révolution, les bolcheviks gagnaient du terrain sur la base de l’expérience des masses. Après l’échec de l’offensive contre-révolutionnaire du général Kornilov, fin août, les bolcheviks conquirent la majorité des soviets, qui, en octobre, prirent le pouvoir à Petrograd et Moscou. Mais il fallut encore trois années de lutte et de guerre civile pour venir à bout de la contre-révolution sur l’ensemble du territoire de l’ancien régime. Contrairement à ce que racontent certains historiens, la révolution russe ne fut pas une conspiration ou un « coup d’État » mené par une poignée de fanatiques. C’était un mouvement de masse qui a réussi à vaincre non seulement les armées de la contre-révolution interne, mais aussi celles d’une vingtaine de puissances étrangères.
Une révolution ne se développe jamais en ligne droite. En 1917, les masses devaient faire face aux leurres et subterfuges de la réaction, ainsi qu’à la duplicité des dirigeants « conciliateurs » (mencheviks et socialistes-révolutionnaires) qui voulaient arrêter la révolution à mi-chemin. À travers ses nombreux retournements, entre février et octobre 1917, la révolution n’aurait pas été victorieuse sans l’existence d’un parti révolutionnaire capable de proposer un programme et une stratégie permettant de balayer les obstacles qui se dressaient sur son chemin. Un tel parti ne pouvait pas s’improviser dans le feu de l’action ; le parti bolchévik était le fruit d’une longue préparation théorique et pratique, dans la période antérieure à la révolution. Et de même que les marxistes russes se préparaient à la révolution par l’étude de la théorie et des enseignements des révolutions du passé (dont celle de 1871, en France), la génération actuelle de révolutionnaires se doit d’étudier sérieusement la théorie marxiste et l’expérience des révolutions – victorieuses ou non – du XXe siècle, et notamment la révolution russe de 1917. Les révolutions du passé ont connu des difficultés et des défaites, mais celles-ci contiennent la clé de nos victoires futures.
Dans la première partie de La révolution trahie, Trotsky insiste sur les accomplissements de la révolution russe. Malgré les zigzags et les incohérences de la politique du régime, après la mort de Lénine (1924), et malgré la corruption de la bureaucratie, nous ne connaissons aucun autre exemple, dans toute l’histoire de l’humanité, d’une élévation aussi rapide et importante du niveau économique et culturel d’un pays. Trotsky donne de nombreuses statistiques qui illustrent la transformation qui était en cours. Ceci constitue une preuve irréfutable de la supériorité de la planification économique sur le chaos destructeur du capitalisme. En l’espace d’une génération, la société a été transformée de fond en comble, enregistrant des progrès majeurs dans toutes les branches de la production, ainsi que dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la recherche, des sciences, de la technologie et de la lutte contre l’illettrisme. Certes, le bureaucratisme du régime faisait aussi des ravages dans tous ces domaines. C’était une abomination qui n’avait rien à voir avec le socialisme. Mais ceci n’est pas un argument contre la nationalisation et la planification de l’économie. Au contraire, l’amélioration des conditions d’existence et du niveau culturel de dizaines de millions de personnes, surtout à partir du deuxième plan quinquennal, n’a été possible que grâce à la planification, grâce à l’abolition du capitalisme, et malgré les conséquences négatives du bureaucratisme.
Trotsky démontre que la dégénérescence bureaucratique de l’URSS ne s’explique nullement par des abstractions telles que la « nature humaine ». Elle découle des circonstances historiques concrètes auxquelles la révolution russe était confrontée. Avant comme après 1917, Lénine et Trotsky étaient d’implacables internationalistes. Ils prévenaient que si la révolution ne s’étendait pas au-delà des frontières de la Russie, pour devenir au moins européenne, le pouvoir soviétique finirait par s’effondrer. Ils considéraient la révolution russe comme le premier acte d’une révolution internationale. Toute leur politique reposait sur cette prémisse. En 1919, la création de l’Internationale Communiste, « parti de la révolution mondiale », s’inscrivait dans cette perspective. Si, même dans un pays nettement plus industrialisé et culturellement avancé que la Russie, l’élimination des inégalités sociales et l’établissement du socialisme était hors de question sans l’internationalisation de la révolution, ces objectifs étaient d’autant plus impossibles à atteindre dans un pays pauvre et arriéré qui, de surcroît, avait subi les ravages de la première guerre mondiale, de la guerre civile et des guerres d’intervention. Lénine et Trotsky ne se faisaient aucune illusion sur ce point. Ils ne cherchaient pas à dissimuler à la classe ouvrière la fragilité du pouvoir soviétique. Ils n’ont jamais prétendu que le socialisme existait en Russie. Au contraire, ils expliquaient inlassablement que la réalisation et la consolidation des objectifs de la révolution étaient inconcevables en dehors d’une révolution internationale.
La classe ouvrière avait pris le pouvoir dans un pays arriéré, où le niveau de développement des forces productives était insuffisant pour construire une société socialiste. Compte tenu de la défaite des tentatives révolutionnaires en Europe et des difficultés économiques sur le plan intérieur, la Nouvelle Politique Economique (NEP) a été adoptée en 1921. Elle restaurait partiellement des mécanismes de « marché », en particulier dans les campagnes. Il fallait gagner du temps, dans l’attente d’une nouvelle vague révolutionnaire en Europe. Lénine et Trotsky était conscients des dangers inhérents à la NEP, qui renforçait le poids économique et social des paysans riches (koulaks). Le penchant à l’accumulation primitive du paysan et le bas niveau de la productivité du travail dans l’industrie minaient la planification économique. L’introduction de la NEP coïncidait avec un repli du mouvement révolutionnaire sur le plan intérieur – et l’échec d’une série de révolutions en Europe. En Russie, la guerre civile de 1918-21 avait décimé et dispersé l’avant-garde ouvrière. Quant aux masses qui s’étaient mobilisées sous sa direction, elles étaient largement épuisées.
Le repli des forces révolutionnaires ne pouvait que faciliter la montée en puissance d’une bureaucratie qui gagnait sans cesse en assurance. L’abandon de l’internationalisme révolutionnaire et l’adoption de la théorie du « socialisme dans un seul pays » – formulée pour la première fois par Staline, fin 1924, et officiellement adoptée par l’Internationale Communiste en 1928 – répondait au conservatisme d’une caste bureaucratique soucieuse de rétablir la « stabilité » intérieure et extérieure, afin de consolider son pouvoir et ses privilèges. Le « marxisme » officiel fut progressivement vidé de sa substance révolutionnaire et transformé en une justification des soubresauts et contradictions de la politique officielle. Les sections nationales de l’Internationale Communiste devaient suivre la « ligne » stalinienne à travers tous ses zigzags. Finalement, l’Internationale fut dissoute d’un simple trait de plume par Staline, en 1943.
Les normes de répartition bourgeoises auxquelles le régime soviétique était acculé – comme par exemple le travail aux pièces – engendraient une différenciation sociale. Le développement économique améliorait lentement mais sûrement la condition des travailleurs. Mais en même temps, il contribuait à former une caste de bureaucrates privilégiés qui, se plaçant en arbitre des antagonismes sociaux, avaient des intérêts distincts de ceux des travailleurs.
Dans les dernières années de sa vie, Lénine engagea une lutte contre la bureaucratisation du parti et de l’État. Puis Trotsky et l’« opposition de gauche » poursuivirent le combat pour défendre les idées et le programme de l’internationalisme révolutionnaire. Mais la défaite de la révolution chinoise, en 1927, scella le sort de l’opposition. Ses partisans sont d’abord exclus du parti, avant d’être massivement arrêtés. Banni d’URSS en février 1929, Trotsky poursuit sa lutte contre le stalinisme à partir de ses différents lieux d’exil : la Turquie, la France, la Norvège et enfin le Mexique. A partir de 1936, Staline organise la liquidation physique des plus éminents représentants de la « vieille garde » bolchevique. Le « procès des seize » – parmi lesquels Zinoviev, Kamenev et Smirnov – les accuse de haute trahison, de sabotage et d’assassinats. Condamnés à mort, ils sont tous exécutés d’une balle dans la nuque, le lendemain du verdict. Dans la foulée, des dizaines de milliers de militants associés à la révolution d’Octobre et à l’opposition de gauche sont arrêtés et internés. Dans les camps staliniens, ceux qui ne meurent pas de froid, de faim ou de sévices y seront froidement exécutés. En 1937 et 1938, Staline fait condamner à mort Radek, Piatakov, Boukharine, Rykov, Rakovsky, Toukhatchevski – et une quarantaine d’autres dirigeants politiques et militaires.
Pour Trotsky, si les rapports de propriété établis par la révolution d’Octobre subsistaient encore, et si la bureaucratie devait défendre ces rapports qui étaient la source de ses privilèges et de son pouvoir, l’évolution des contradictions accumulées allait nécessairement préparer les bases d’un nouveau bouleversement. À un certain stade, expliquait-il, l’existence du pouvoir arbitraire d’une caste bureaucratique, étrangère au socialisme, entrerait en contradiction avec les besoins de l’économie planifiée. La planification « a besoin de démocratie comme le corps humain a besoin d’oxygène ». Dès lors, Trotsky posait l’alternative suivante : soit les travailleurs de Russie renversent la bureaucratie et rétablissent la démocratie soviétique – soit, à terme, le capitalisme sera rétabli.
Cette perspective historique a trouvé une confirmation éclatante dans l’effondrement de l’URSS et des régimes bureaucratiques d’Europe centrale – ainsi que dans le rétablissement du capitalisme actuellement en cours en Chine et au Vietnam. En 1936, Trotsky soulignait que la restauration du capitalisme en URSS pourrait avoir lieu en conséquence d’une défaite militaire – ou bien comme le résultat des contradictions internes du régime bureaucratique. Cependant, Trotsky ne pouvait évidemment pas tout prévoir. Le déroulement et l’issue de la deuxième guerre mondiale n’étaient pas conformes aux perspectives qu’il avait formulées avant son assassinat, en août 1940. Soit dit en passant, au début du conflit, aucun dirigeant – ni en URSS, ni dans le monde capitaliste – n’avait anticipé le scénario et les conséquences de la guerre. Après la défaite de l’Allemagne nazie et du Japon, le capitalisme a été renversé en Chine et en Europe centrale, où il a été remplacé par des régimes à l’image de l’URSS. Contrairement aux perspectives de Trotsky, le stalinisme est sorti considérablement renforcé de la guerre, et ce pour toute une période historique. Mais ceci n’a fait que reporter à plus tard – jusqu’au début des années 90 – le bouleversement que Trotsky avait anticipé en analysant les contradictions fondamentales du régime soviétique. Et comme il l’avait prévu, c’est la bureaucratie elle-même qui a restauré le capitalisme en Russie.
L’effondrement de l’URSS a fourni l’occasion d’une puissante offensive idéologique contre le socialisme. Dans les médias, comme dans les milieux politiques et académiques, les apologistes du capitalisme triomphaient. Le socialisme avait échoué. La restauration du capitalisme sur l’ensemble du territoire de l’ex-URSS, en Europe centrale et – avec un train de retard – en Chine, constituait la preuve concrète et irréfutable de la supériorité du système capitaliste. À défaut d’alternative viable, le capitalisme devait être considéré comme la forme d’organisation sociale définitive de l’espèce humaine. Tel était le sens de la thèse bien connue de l’économiste Francis Fukuyama, pour qui l’effondrement des États « socialistes » marquait la « fin de l’histoire », l’humanité ayant enfin trouvé un « consensus » sur la base du système capitaliste.
La propagande sur « l’échec du socialisme » était accompagnée de perspectives glorieuses. Avec la fin de la guerre froide, les sommes colossales dépensées jusqu’alors dans l’armement pourraient être consacrées à la création d’emplois, à la santé publique, à l’éducation, au logement et aux services publics. Grâce à ces « dividendes de la paix », la pauvreté et les inégalités sociales allaient s’atténuer. En même temps, sous l’aile protectrice des puissances impérialistes – et notamment de la superpuissance américaine –, la « démocratie » (capitaliste) allait enfin s’étendre dans le monde entier.
Les économies d’ex-URSS, d’Europe centrale et de Chine furent intégrées au marché mondial. Les ressources de ces vastes territoires furent livrées à la voracité capitaliste. L’expansion du marché mondial s’accompagnait d’une augmentation exponentielle du crédit et des produits financiers « dérivés ». Une masse colossale de capitaux fictifs fut injectée dans les circuits économiques, ce qui permettait d’éviter la saturation des marchés – provisoirement. Intoxiqués par la « mondialisation », les économistes bourgeois croyaient que le capitalisme avait trouvé le moyen de surmonter ses contradictions fondamentales. Les crises de surproduction, que Marx considérait comme inhérentes au capitalisme, appartenaient au passé. Cette pression idéologique ne fut pas sans conséquences au sein du mouvement ouvrier international. De manière générale, les dirigeants des partis sociaux-démocrates emboîtèrent le pas des représentants directs de la classe capitaliste, au point que leurs idées et leurs politiques ne se distinguaient plus guère de celles des partis de droite. Les partis communistes furent également affectés. En France, le soutien de la direction du PCF aux privatisations menées sous le gouvernement Jospin en était une illustration.
Mais cette euphorie ne pouvait durer indéfiniment. Les lois fondamentales du capitalisme, découvertes et expliquées par Marx au XIXe siècle, avaient été temporairement masquées par l’expansion massive du crédit. Mais elles opéraient tout de même. D’une part, la Chine capitaliste n’est pas seulement un marché ; elle est aussi une source de production, à des prix très compétitifs. La part du marché mondial ainsi conquise réduit d’autant la part des États-Unis et des pays européens. Par ailleurs, comme l’expliquait Marx, le crédit – c’est-à-dire l’endettement – n’a d’autre fonction, en définitive, que d’augmenter artificiellement et temporairement la demande. Tôt ou tard, les crédits contractés, que ce soit par des ménages, des entreprises ou des États, doivent être remboursés… avec les intérêts ! D’un facteur d’accroissement de la demande, l’endettement s’est transformé en un facteur de contraction de celle-ci. La crise de surproduction qui en résulte est d’autant plus grave qu’elle s’accompagne de niveaux d’endettement sans précédents – en temps de paix – des États-Unis et de l’Europe.
Toutes les théories sur le « cycle vertueux » du capitalisme se sont effondrées comme un château de cartes. L’euphorie a fait place à un pessimisme noir. Les politiques d’austérité mises en œuvre à ce jour ne sont rien à côté de ce qui nous attend dans les années à venir. Le capitalisme signifie la régression sociale permanente. Il détruit l’industrie, jette des millions de travailleurs dans la rue, s’attaque à l’éducation et à la santé. Il a ruiné les finances publiques – y compris dans le plus puissant pays capitaliste au monde. Il se dresse comme un obstacle à tout progrès social et économique. C’est pourquoi l’histoire n’est pas « finie » et le socialisme n’est pas mort. Dans l’esprit des victimes de cette débâcle sociale, une vérité fondamentale devra faire son chemin : tant que les capitalistes conserveront le contrôle de l’économie et de l’État, aucune solution positive ne s’offrira aux travailleurs. On assiste aujourd’hui à un regain d’intérêt pour les idées du marxisme. Mais le réarmement idéologique du mouvement ouvrier ne se fera pas automatiquement. Une compréhension des idées fondamentales du marxisme et des leçons des révolutions passées est plus nécessaire que jamais. Il faut réarmer le mouvement ouvrier, le doter d’un programme, de perspectives et d’une stratégie visant à fixer l’attention des travailleurs sur la nécessité d’une nouvelle révolution. Sans théorie révolutionnaire, il n’y a pas d’action révolutionnaire possible.
Une compréhension des causes et de la nature du stalinisme fait partie intégrante de la clarification idéologique nécessaire. Elle nous permettra de contrer la propagande capitaliste qui cherche à discréditer les idées du communisme. Il ne suffit pas de « prendre ses distances » avec le stalinisme. Il faut pouvoir l’expliquer d’un point de vue marxiste. L’étude de La révolution trahie nous y aidera grandement.
Greg Oxley (août 2011)