Une « surveillance » liberticide

L e lundi 13 avril 2015, le gouvernement Valls a déposé à l’Assemblée Nationale un projet de loi portant sur le renseignement, présenté à la fois comme un rempart contre le terrorisme et une avancée démocratique. En réalité, c’est une loi généralisant la surveillance de la population, y compris évidemment celle de ses éléments les plus en pointe dans la lutte contre le capitalisme et l’impérialisme.

Selon la terminologie officielle, la loi est censée « donner un cadre légal aux activités des services de renseignement », tout en instituant des garde-fous démocratiques contre l’arbitraire étatique et en élargissant les techniques de renseignement actuelles à des procédés de recueil d’informations dignes de Big Brother.
En termes de « cadre légal », cette loi « limite » la surveillance de la population aux domaines suivants : « la sécurité nationale, les intérêts essentiels de la politique étrangère et l’exécution des engagements internationaux de la France, les intérêts économiques et scientifiques essentiels de la France, la prévention du terrorisme, la prévention de la reconstitution ou du maintien de groupement dissous (groupes de combat et milices privées), la prévention de la criminalité et de la délinquance organisées, la prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique ».

Dans les faits, cette loi permettra aux agents de l’Etat de surveiller impunément tout mouvement luttant contre une intervention étrangère de la France, la négociation des accords transatlantiques, les pratiques illégales des entreprises françaises en France ou à l’étranger. Des syndicalistes préparant des mobilisations se verront espionnés dans leurs moindres faits et gestes du moment que le système informatique de l’Etat aura décelé des communications « suspectes » dans la masse gigantesque de données privées auxquelles il aura accès.

Certes, quelques naïfs pourront se sentir rassurés par les volets anti-terroristes et anti-criminalité de ce projet de loi. Mais les travailleurs doivent savoir que cette loi ne fait que légitimer des pratiques déjà existantes qui n’ont jamais rien réglé dans ces domaines. Ainsi, les responsables des derniers attentats terroristes, Mohamed Merah à Toulouse et les frères Kouachi à Charlie Hebdo, étaient connus des services de renseignement qui n’ont pu stopper leurs folies meurtrières provoquant la mort d’innocents dans des conditions atroces et la désolation sans fond au sein de leurs familles.

Le gouvernement a beau jeu de rassurer les mêmes naïfs de l’innocuité de son projet de loi liberticide. En effet, le texte institue la création d’une autorité administrative « indépendante » que les citoyens pourront saisir s’ils considèrent qu’ils font l’objet d’une surveillance abusive.

Mais l’ « indépendance » de cette institution s’arrêtera là où les intérêts de la classe dominante commenceront. Ainsi, elle n’aura qu’un avis consultatif, et le pouvoir de décision final appartiendra au premier ministre.

Le projet de loi fait l’objet d’un rejet sans équivoque d’une partie très importante d’associations qui militent pour la défense des libertés démocratiques : du Syndicat de la Magistrature et l’Union Syndicale des Magistrats, jusqu’aux défenseurs des Droits de l’Homme et du Citoyen comme Amnesty International, en passant par des organisations militantes comme La Quadrature du Net. Toutes dénoncent le flou qui entoure le projet de loi et les dangereuses dérives anti-démocratiques qu’il va à coup sûr engendrer.

La CGT dénonce la défense par l’Etat des intérêts économiques de la classe dominante et le risque évident de la surveillance généralisée des travailleurs en lutte. Le PCF pour sa part met en garde contre la mise en place de moyens de surveillance intrusifs comme les « boîtes noires » sous scellés dans les serveurs des fournisseurs d’accès à Internet, permettant une surveillance constante des communications privées entre les citoyens.

Cependant, toutes ces organisations ne dénoncent pas clairement la racine du mal, à savoir le système capitaliste lui-même. On peut le comprendre de la part de la petite bourgeoisie réformiste qui croit encore en un rôle positif de l’Etat capitaliste. Mais le mouvement ouvrier doit demander plus que le simple retrait de ce projet de loi. Il doit aussi expliquer aux travailleurs que ce projet de loi est la manifestation d’un affolement de la classe dominante qui sent son propre système lui échapper et qui en conséquence renforce le contrôle de ceux qui luttent contre leur domination.

R.B.

PCF Paris 18

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